jeudi 11 août 2016

DUNE

Peut-on comparer le film au roman ? De prime abord, je dirais non. Un roman est beaucoup plus détaillé, plus fourni qu'un film. D'ailleurs, il n'y a rien de plus qui m'énerve que d'entendre "Oh ! le roman est beaucoup mieux." Bien évidemment. Ce sont deux matières différentes. Le roman est la réflexion personnelle d'un auteur. Le film est un projet commun, un travail d'équipe sous la direction d'un réalisateur et bien entendu la supervision d'un producteur. Bien entendu, l'éditeur va reprendre le rôle de supervision, mais ce rôle est beaucoup moins oppressant. Ce sont deux métiers différents.


Revenons au sujet. Même si les deux sont incomparables, le film ne cesse de rappeler des éléments du roman d'Herbert qui, rappelons-le, a supervisé le film de David Lynch. Et cette analogie entre le livre et le film est le principal point faible du film. Déjà que celui-ci a mal vieilli, pire que les effets spéciaux ne sont pas géniaux, même pour l'époque (Star Wars et Blade Runner sont passés avant quand même). Et ne parlons pas de la narration... Ah bah non, on va en parler quand-même c'est elle qui casse le film.
 
Alors, je rassure le lecteur de ce billet : je ne cherche pas à casser le film. Au contraire, je cherche à le défendre, surtout quand j'entend que tout le monde fantasme sur la version avortée de Jodorowski oubliant que l'artiste chilien est un très mauvais réalisateur. Car oui, Dune aurait dû être le film de référence dans la Science-Fiction.


Seulement, voilà. Voulant faire du fan-service avant l'heure, Lynch s'est lamentablement planté. Il a tiré du livre tout ce qui le ralentissait à commencer par les pensées des personnages qui lèvent toute empathie, et signe une narration déplorable. Heureusement que les acteurs sont très bons, sinon "Dune" ne serait pas considéré comme un nanar mais comme un véritable navet. Mais nous y reviendrons plus tard.

Là, où Lynch s'est surpassé dans l'art de la confusion est qu'il oublie très souvent l'esprit du livre. A commencer par les ordinateurs qui sont remplacés par les "Mentats", hommes conditionnés à être de véritables logiciels humains. Certes, un film n'est pas tenu de suivre le roman, je veux pour exemple Tom Bombadil dans "le Seigneur des Anneaux" mais quand un film reprend le côté psychédélique et new-âge d'un roman, il faut qu'il assume jusqu'au bout. Bon, ne parlons pas de l'absence de capes chez les Fremens, (là ok, je chipote), de la "polygamie" de Stilgar et celle imposée à Paul Muab-Dib (qui elle aurait pu être développée) ou encore le combat dans l'arène entre Feyd-Rautha (joué par Sting) contre des esclaves. 
 
 
Oui, ce sont des détails, et le syndrome Tom Bombadil tourne autour de mon clavier. Or, David Lynch persiste dans l'art de la dichotomie narrative et s'évertue à faire référence au livre tout en ne le respectant pas. Je parlais de la narration avec les pensées des personnages que Lynch a porté à l'écran et qui polluent le film, que penser des personnages ? Oui les acteurs sont bons ! Oui presque tous les personnages sont là ! Et c'est encore un problème. La présence de certains n'est plus justifié. Déjà que le livre lui-même rencontre ce problème avec certains passages (mais au fil du cycle on comprend leur présence). Je pense à Liet Kynes ou Gurney Halleck dont le rôle dans le film est négligeable. Leur présence saccade le film et l'on assiste à un défilement d'images et de personnages pour assurer le fan service. Marvel n'a rien inventé.

Cette adaptation est difficilement défendable. Surtout depuis un certain Peter Jackson. On l'a bien vu, l'intégrale du "Seigneur des Anneaux" fait 1200 pages et il a fallu 3 films de plus de 3 heures chacun pour l'adapter (et je ne parle pas des versions longues). Le premier tome de Dune fait 800 pages soit l'équivalent d'une trilogie à la Star Wars (soit 3 films de 2heures ou un diptyque de 3heures pour chacun).
 
Et pourtant, il y avait de très bonnes idées et de bonnes initiatives. Je ne sais pas ce qui a été voulu par DiLaurentis et ce qui a été voulu par Lynch. Parait-il que la Director's cut n'est pas mieux (mais au moins on voit Gurney Halleck jouer de la ballisette). D'ailleurs, non seulement je déteste l'expression Director's cut, mais pour moi un film quand il est tourné, il n'a pas à être changé. 
 
Les bonnes idées ? Les pustules et la perversité du Baron Harkonnen. Un excellent méchant dans l'histoire du cinéma. En règle générales, la caractérisation des Harkonnen est très subtile, très intéressante. D'ailleurs, Sting s'en sort pas mal en Feyd-Rautha. Le duel entre Paul et celui-ci est une très bonne scène qui aurait pu avoir plus d'intensité si l'on avait vu ce dernier à l'œuvre un peu plus tôt. Le roman relate un combat dans l'arène entre Feyd-Rautha et des gladiateurs, cette idée aurait pu être creusé et donner plus d'impact.
De même que les deux autres familles, à savoir les Corrinos et les Atréïdes drapés dans de somptueux costumes et donc la caractérisation est fidèle au livre.
 
 
 
"Dune" aurait pu être un meilleur film, une meilleure adaptation. Peut-être qu'un jour quelqu'un en fera un remake intéressant. Reste les livres que je ne saurai que trop vous conseiller et qui vous permettront de savoir pourquoi son adaptation a été un échec.

Et ne me parlez pas de Jodorowski.

Votre Serviteur

Lorenzo Garnieri

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